Les musiciens et leurs instruments
Les pratiques rituelles. initiatiques et thérapeutiques
des Gnawa sont animées et conduites par deux types d'intervenants :
les maîtres musiciens (maâlem) et leurs troupes, d'autre part
les voyantes thérapeutes. Ils sont les principaux membres de la confrérie
et agiront soit de concert, soit séparément selon l'activité
envisagée.
Les musiciens gnawa se divisent en deux catégories : Les maîtres
musiciens et la troupe qui est sous leur direction. Le maître musicien
est appelé maâlem (plur. : maâlmin), il est le garant du
culte et de la tradition musicale. Au Maroc, ce terme désigne toute
personne ayant une maîtrise ou un savoir-faire dans une activité
donnée, qu'elle soit technique ou intellectuelle. On trouvera des maâlmin,
par exemple, dans l'artisanat. Pour obtenir ce statut, l'apprenti devra être
reconnu officiellement par les membres de sa corporation et par les maâlmin
qui l'ont précédé.
L'instrument de musique principal chez les Gnawa qui animent la lila de derdeba,
le rite de possession, se nomme le guembri. Cet instrument est joué
par le maître musicien (le maâlem). Le maâlem est également
le chanteur principal de la troupe. Les autres musiciens de la troupe jouent
les qarqabu, sorte de castagnettes en métal, et exécutent les
danses. Ils sont généralement les disciples du maâlem
et aspirent à devenir maître à leur tour. Ils réalisent
également le contre-chant en répétant en coeur les devises
chantées par le maître. Toutefois, il arrive que le maître
jouant le guembri soit trop fatigué pour chanter et confie cette tâche
à un de ses disciples.
Le guembri est un luth tambour à trois cordes et à registre
bas. Il est constitué d'une caisse de résonance et d'un manche
en bois. Le bois utilisé peut être du noyer ou de l'acajou, mais
les anciens maîtres préfèrent le bois de peuplier qui
donne une meilleure résonance. La caisse du guembri mesure soixante
centimètres de long, vingt centimètres de large et quinze de
profondeur. Elle est traversée par un manche d'environ un mètre.
Les guembri qui servent à l'apprentissage sont appelés "aouicha"
et sont plus petits. La caisse de résonance du guembri est recouverte
par une peau de dromadaire séchée et tannéepartie utilisée
est le cou du dromadaire. C'est cette peau qui, frappée par la main
droite du musicien en même temps que les cordes, donnera au guembri
un son de percussion. Le guembri possède trois cordes. Deux cordes
remontent jusqu'en haut du manche, celle du milieu s'arrête à
la moitié du manche, elle est jouée à vide par le maâlem.
Les cordes sont faites à partir des intestins d'un bouc bien gras pour
qu'elles ne cassent pas au moment de la préparation. La confection
de chaque corde du guembri demande un nombre précis d'intestins. Les
intestins servant à fabriquer les cordes viennent toujours d'un animal
sacrifié rituellement selon les usages des Gnawa. Un sistre métallique,
la "sersèra", vient s'encastrer à l'extrémité
du manche du guembri, il est mis en résonance par les mouvements de
l'instrument et les vibrations des cordes.
Les qarqabus, aussi appelés crotales ou qraquech, sont utilisés
par la troupe qui est au service du maâlem. Ce sont deux cupules en
fer, identiques, de treize centimètres de diamètre, reliées
par une tige métallique de neuf centimètres sur trois de large.
Le musicien tient dans chaque main deux de ces claquettes et les entrechoquent.
les parties concaves symétriques se faisant face. Un lacet en cuir
de vache fixe les cupules intérieures par une extrémité
perforée. Un autre lacet, passé par deux trous le long de la
tige métallique, permet de glisser le pouce dans le qarqabu supérieur
et les quatre doigts dans l'autre.
Lors de l'introduction de la partie sacrée du rite de possession, les
Gnawa utilisent deux tambours appelés "tbel". Le tbel est
maintenu sur le coté gauche du musicien, maintenu par une bandoulière
et frappé par deux baguettes dont l'une est courbée et l'autre
droite. Le tbel est utilisé par paire et accompagné de quatre
paires de qarqabus.